L’hémophilie, une maladie rare, sous diagnostiquée

Publié par Marion Guibourdenche, le 17 avril 2022   2k

Le 17 avril est marqué par la journée mondiale de l’hémophilie. Cette journée de prévention santé vise à attirer l’attention sur l’hémophilie et les autres troubles héréditaires de la coagulation. Cela est réalisé dans le but de renforcer l’accès durable et équitable à une offre de soins et aux traitements pour les patients concernés. Il est important de sensibiliser et d'augmenter le dépistage de cette maladie sous-diagnostiquée, sous-déclarée [1].

Parlons un peu de cette maladie rare…

L’hémophilie est une maladie génétique rare héréditaire correspondant à un défaut de coagulation du sang. Plusieurs protéines, appelées facteurs de coagulation, sont impliquées dans la coagulation. La protéine déficitaire définit le type de maladie : l'hémophilie A, qui concernent 80 % des cas, se caractérise par une défaillance en facteur de coagulation VIII, alors que l’hémophilie B, beaucoup plus rare, 20 % des cas, provient d’une faiblesse du facteur de coagulation IX. Cette protéine peut être totalement absente de l’organisme ou ne pas être fonctionnelle, cela dépend de la mutation génétique. Le degré de sévérité de la maladie est proportionnel à cette défaillance des facteurs de coagulation. 

Cette perturbation induit des saignements plus ou moins importants dès le plus jeune âge. Cette pathologie est associée à une morbidité et une mortalité conséquentes. Les saignements, principalement retrouvés au niveau des muscles et des articulations, provoquent fréquemment des hématomes importants. Certaines zones de saignements (cerveau, abdomen) peuvent engager le prognostic vital du malade. L’apparition d’hémarthroses caractérisées par des épanchements de sang au niveau des articulations, est fréquente et est très douloureuse. De manière répétée, ceci peut dégrader le cartilage, altérer l’articulation et induire une perte de mobilité [2].

Une maladie majoritairement masculine…

Les gènes codant pour les facteurs de coagulation se situent sur le chromosome X, détenu une seule fois par les hommes contre deux chez les femmes. De ce fait, un homme héritant de ce gène muté est systématiquement atteint d’hémophilie. Les femmes le sont si elles héritent de deux chromosomes X détenant tous les deux le gène muté.

Cette maladie est diagnostiquée lors de l’observation d’un temps de coagulation du sang anormalement long. Suite à cela, les facteurs de coagulation sont dosés grâce à une prise de sang afin d’estimer la sévérité et le type de maladie. Celui-ci est effectué systématiquement en cas d’antécédents familiaux [2].

Quelle prise en charge…

L’hémophilie est une pathologie non-curative, qui ne se guérit pas, mais qui se stabilise grâce à des traitements substitutifs. La prise en charge de ces patients consiste à remplacer les facteurs de coagulation défaillants ou inexistants par des concentrés de ces protéines injectés par voie intraveineuse. Celles-ci peuvent avoir lieu plusieurs fois par semaine en cas de maladie sévère ou modérée afin de maintenir une concentration suffisante de facteurs de coagulation dans le sang, ou en cas d’accident. Cependant, dans certains cas, des anticorps dirigés contre ces facteurs de coagulation peuvent compromettre l’efficacité du traitement chez certains patients.

L’accent est actuellement mis dans la recherche afin d’améliorer cette thérapie, notamment en augmentant la durée de vie des concentrés des facteurs de coagulation pour espacer les injections ou de limiter l’apparition des anticorps dirigés contres ces protéines impliquées dans la coagulation. De nouvelles thérapies sont également à l’étude afin d’améliorer la qualité de vie des malades en rétablissant l'équilibre hémostatique, équilibre entre le déclenchement du processus de coagulation et sa neutralisation. Des thérapies géniques sont également en cours de recherche pour améliorer l’efficacité de ces traitements. L’idée est de permettre au malade de produire le facteur de coagulation défaillant afin de devenir indépendant du traitement de substitution [2,3,4,5,6].

Quelques conseils nutritionnels…

L’alimentation n’a pas d’incidence sur cette maladie, aucun aliment ne guérit ou ne bonifie ni n’alourdit ses symptômes. Cependant, quelques choix alimentaires peuvent améliorer la qualité de vie des patients concernés. Une alimentation équilibrée est importante, notamment que le surpoids et l’obésité infantile concernent les plus jeunes malades. En effet, il est fréquent que ceux-ci limitent, par précaution, leurs activités physiques afin de diminuer le risque d’hémorragie. De plus, il est important de maintenir des niveaux de fer adéquats chez ces patients (11 mg/jour), qui sont perdus avec les saignements. La consommation d’aliments riches en fer, tels que la viande rouge, les produits carnés et les légumes verts. La vitamine C a également son importance pour une bonne absorption du fer par l'organisme, en préconisant une consommation d’agrumes, de fruits rouges, de poivrons, de choux… [7].

L’hémophilie n’est pas la seule maladie caractérisée par des troubles de la coagulation. D’autres facteurs sont impliqués dans ce processus et sont impliqués dans d’autres maladies de la coagulation, telles que la maladie de Willebrand [8].

Marion Ricour (Guibourdenche)

Docteure en Biologie Santé

Ingénieure en Alimentation & Santé


Sources : 

[1] El Demerdash DM, Ayad A, Tawfik N. Acquired hemophilia A (AHA): underreported, underdiagnosed, undertreated medical condition. Egypt J Intern Med. 2022;34(1):12. doi: 10.1186/s43162-021-00074-9. Epub 2022 Jan 25. PMID: 35095264; PMCID: PMC8788911.

[2] Hémophilie : Une maladie hémorragique héréditaire. INSERM. Mis en ligne le 10/07/2017, mis à jour le 16/04/2013. Disponible en ligne : https://www.inserm.fr/dossier/hemophilie/

[3] Regling K, Callaghan MU, Sidonio R Jr. Managing Severe Hemophilia A in Children: Pharmacotherapeutic Options. Pediatric Health Med Ther. 2022 Feb 15;13:27-35. doi: 10.2147/PHMT.S293246. PMID: 35210899; PMCID: PMC8857990.

[4] Hart DP, Matino D, Astermark J, Dolan G, d'Oiron R, Hermans C, Jiménez-Yuste V, Linares A, Matsushita T, McRae S, Ozelo MC, Platton S, Stafford D, Sidonio RF Jr, Tiede A. International consensus recommendations on the management of people with haemophilia B. Ther Adv Hematol. 2022 Apr 2;13:20406207221085202. doi: 10.1177/20406207221085202. PMID: 35392437; PMCID: PMC8980430.

[5] Hermans C, Reding MT, Astermark J, Klamroth R, Mancuso ME. Clinical studies of extended-half-life recombinant FVIII products for prophylaxis in adults and children: a critical review from the physician's perspective. Crit Rev Oncol Hematol. 2022 Apr 4:103678. doi: 10.1016/j.critrevonc.2022.103678. Epub ahead of print. PMID: 35390452.

[6] Skinner MW, Dolan G, Eichler H, O'Mahony B; International Haemophilia Access Strategy Council. A preliminary application of a haemophilia value framework to emerging therapies in haemophilia. Haemophilia. 2022 Mar;28 Suppl 2:9-18. doi: 10.1111/hae.14511. PMID: 35318780.

[7] HAEMOPHILIA: FIVE THINGS TO EAT AND FIVE THINGS TO AVOID. Belgian Journal of Hematology. Healthy living. News. Publié en Mars 2019.  Disponible en ligne : https://www.bjh.be/haemophilia....

[8] Franchini M, Seidizadeh O, Mannucci PM. Prophylactic management of patients with von Willebrand disease. Ther Adv Hematol. 2021 Dec 22;12:20406207211064064. doi: 10.1177/20406207211064064. PMID: 34987743; PMCID: PMC8721401.